Sunday 28 September 2008

Vous reprendrez bien un peu d'arsenic avec votre lewisite ?

Il y a quelques jours que cette idée de pique-nique convivial dans une quelconque forêt de Russie nous trotte dans la tête. C'est vrai : il fait beau depuis une semaine (jusqu'à 20 degrés aujourd'hui) et il nous faut profiter de ces derniers rayons de soleil, avant que la neige ne reprenne ses droits. (Au fait, il a neigé toute la journée de samedi, c'était impressionnant)

Quand nos amis de l'université nous ont proposés de venir s'étendre dans l'herbe verte de Dzerjinsk, leur ville natale, nous avons tout de suite accepté. Et aujourd'hui, alors que je tente de me renseigner sur cette petite ville, je tombe sur cet article effarant...




DZERJINSK



Sa population était estimée à 285 000 habitants en 1995.

Fondée en 1920, la ville s'appelle Rastiapino jusqu'en 1929. Le nom actuel de la cité vient de Félix Dzerjinski, l'un des meneurs bolcheviques qui devint ensuite le premier chef de la tchéka (police secrète qui fut le fer de lance de la mise en place du stalinisme en Union soviétique, instaurant partout la suspicion et la terreur). (un sympathique petit bonhomme, dîtes-moi, ce Dzerjinsk...)

La ville moderne de Dzerjinsk est un important centre de l'industrie chimique russe. Par le passé, elle a aussi été l'un des sites de production d'armes chimiques. De ce fait, et pour des raisons stratégiques, cette ville était jusque récemment fermée aux visiteurs étrangers. ( tout comme Nijni-Novgorod il y a dix ans)

L'industrie des armes chimiques avait commencé en 1941, surtout pour produire de la lewisite — dont l'effet toxique est dû au trioxyde d'arsenic qu'il contient — et l'ypérite (« gaz moutarde »). L'usine produisant ces substances était appelée Kaprolactam (ou Caprolaktam) Organic Glass Factory, et en plus des produits mentionnés, produisait de l'acide prussique et du phosgène.( quelqu'un serait-il assez aimable pour m'expliquer tous ces mots barbares ?)

La production cessa en 1945. Quelques matériaux furent transportés dans des lieux de stockage, tandis que la plupart du matériel dut être enterré (et je sens qu'on va pique-niquer sur l'une de ces tombes chimiques avec ma chance légendaire) à cause des grosses concentrations d'arsenic (ah, je savais bien qu'il nous manquait quelque chose), sur le site même de l'usine. L'usine à ypérite a réellement été démantelée à partir de 1994. En 1998 l'unité de production de lewisite n'était pas encore complètement détruite.

Parts of Dzerzhinsk's water are contaminated with dioxins and phenol at levels that are reportedly seventeen million times the safe limit.

Dzerzhinsk's environmental agency estimates that almost 300,000 tons of chemical waste were dumped in the city between 1930 and 1998. The Ecology Committee of the Russian State Duma also considers Dzerzhinsk among top ten cities with the disastrous ecological conditions.

(et voici le clou du spectacle...)

Selon le classement 2007 de l'ONG Blacksmith Institute, Dzerjinsk fait partie des dix sites les plus pollués au monde, cité devant Tchernobyl.


Dzerzhinsk is one of the worst polluted cities of the world and has a life expectancy of 42 years for men and 47 for women, with 2003 death rate exceededing its birth rate by 260%.

Dzerzhinsk City Administration, however, asserts that the Blacksmith Institute report is false, stating, for example, that since sarin had never been produced in the city, it cannot be one of the major pollutants


Je suis gentille, je vous donne le lien des articles, pour que vous ne pensiez pas que je fabule (Click-Clique.) Pique-niquer dans une ville encore plus polluée que cette chère Tchernobyl, ce n'est pas tous les jours que cela m'arrive.

A venir : les photos de moi façon alien radioactif.




Monday 22 September 2008

Instantanés

Instantané n°1 : Dans la marshrutka, je me dore au soleil, et je me réjouis d'être enfin assise. Je contemple l'autre rive de Nijni-Novgorod du haut du Parc Gorki que longe l'autoroute. Tout va bien. J'ouvre Michel Strogoff, page 245 (il vient de se faire brûler les yeux), et lis... Quand SOUDAIN, résonne dans toute la marshrutka l'infâmante voix de Joe Dassin ! Consternation absolue de la seule française présente tandis que le papi russe d'à côté chantonne joyeusement. Mais nous avons évité le pire : Moi Lolita n'était pas loin.


Instantané n°2 : Je m'adapte si bien à la vie russe, que je commence à prononcer des aberrations terribles.

Exemple :

Oksana : - Il fait combien dehors ?

Moi : - Il fait chaud, environ 7 degrés.

Oksana : - Oh super, pas besoin de pull.

Ciel, il est temps que l'on me remette le thermomètre en place.






Instantané n°3 : Alors que je m'apprête à rentrer dans mon immeuble, une baboushka me prend le bras. C'est la grand-mère de Oksana et c'est parti pour une heure de thé et de bavardages oisifs, au milieu de tartes aux pommes et autres gâteries.

Puis, elle m'explique qu'elle est allée dans sa datcha ce week-end (c'est le top fun pour les personnes âgées) et qu'elle a planté plein de fleurs. Elle m'invite à venir bientôt, pour l'aider à cultiver son potager (moi en bottes et pleine de boue = image qui en fera rire plus d'un) et pour voir les fleurs qui auront sûrement éclos d'ici là. Je reste perplexe mais ne bronche pas.

Vu que la neige est attendue pour dans deux semaines, et que nous sommes fin septembre, est-ce bien raisonnable de demander à une fleur d'ouvrir ces pétales là-tout-de-suite-maintenant ? Je vous avoue néanmoins que je suis loin d'avoir la vocation et la culture de fleuriste.






Et expliquez-moi pourquoi les seuls garçons potables sont des bad boys de première ? Ca n'existe pas encore en Russie le modèle masculin type : oui je suis beau mais ce n'est pas pour autant que je cache un couteau dans mon slip ? GRRR.







PS: j'ai failli être amputée de mon pied gauche, pour cause de talon (aiguille, c'est le cas de le dire !!) enfoncé lors d'une bataille suprême pour place dans la marshrutka bondée. Mais j'ai tout de même réussi, clopin-clopant, à m'asseoir, tandis que la cruche est restée debout. Il en faut plus pour m'abattre !









Wednesday 17 September 2008

I love Gorki and Gorki loves me !


J'aime...
... que les baboushkas du bus te réveillent en plein rêve "parce-que si tu dors ma petite tu vas avoir un choc termique en sortant".
... que l'on mange le poulet avec les mains, même dans le plus chic des restos.
... que l'on déteste cordialement la Géorgie tout en se pâmant devant sa gastronomie. Le boycott politique, la Russie ne connaît pas et tant mieux !
... que les filles russes soient toujours habillées à la limite du mauvais goût tout en ayant un sens certain de l'élégance.
... que l'on te conseille les meilleurs thés de la carte quand tu es en train d'en commander un âcre et imbuvable.
... que la marshrutka entière t'écoute religieusement quand tu parles. C'est la leçon de français du jour, ouvrez grand vos oreilles chers camarades !
... que le taxi te raconte sa vie et t'explique (en croyant que ça va te rassurer) qu'il est allé jusqu'en Chine avec sa Lada et que donc il ne faut pas s'inquiéter si elle cale tous les six cents mètres.
... que ma famille chauffe la cuisine en allumant toutes les plaques à gaz, ce qui rend d'un coup mon matin aussi dangereux que celui de James Bond.
... que les graffitis sur les murs soient sponsorisés par CityBank, Edinaia Rossiya (Russie Unie) ou encore par MacDonald's.

J'aime aussi...
... voir briller dans les yeux de chaque baboushka la flamme nostalgique de l'URSS.
... la cuisine russe, où, pendant la cérémonie du thé, chacun parle, parle et parle...
... les trous dans le plancher des marshrutkas.
... les hauts-parleurs dans les rues qui diffusent les infos locales ou les derniers hits du moment.
... les incroyables fautes de langage dans les manuels de français de l'Université. ("Qu'est-ce que c'est que le monsieur a mangé ?", "Qui c'est qui a vu le monsieur manger le chat ?" ou "si ton ami a froid, tu dois le chauffer" !)
... les portraits de Lénine encore affichés sur les anciennes usines.
... le petit bruit du modem russe, qui chante comme les nôtres il y a dix ans.
... les posters dans les marshrutkas. Je suis déjà tombé sur un poème avec Bill Gates en prophète et en sandales.
... les adorables petits surnoms intraduisibles en français.
... habiter la maison d'à côté de celle de Sakharov.
... Vkontakte, le Facebook russe. En fait, vous n'êtes peut-être pas au courant, mais une véritable guerre froide a lieu en ce moment même entre ces deux réseaux sociaux. Sur le site Vkontakte affluent les vidéos et groupes contre Saakchivilii et sur Facebook, les groupes pro-géorgiens. Très très intéressant comme phénomène !

Etes vous au courant ? Nijni Novgorod s'appelait Gorki auparavant, du nom de ce brave Maksim.

Tuesday 16 September 2008

La Russie est un rébus enveloppé de mystère au sein d'une énigme. [citation de ce cher Churchill]


Depuis que je suis arrivée en Russie, je ne compte plus les questions existentielles qui m'assaillent chaque jour.


Comment font les chauffeurs de marshrutka pour changer la monnaie, donner le billet de bus, téléphoner, annoncer les arrêts et conduire en même temps ?



Pourquoi la magnifique jeune fille russe se transforme après en baboushka informe ?

Comment la jeune fille russe peut-elle envisager de marcher en talons avec une ceinture en guise de jupe, alors que les rues sont boueuses et que le temps est à la pluie et au gel ?

A quoi pense la baboushka de mon immeuble qui balaie toute la journée, courbée en deux, les feuilles d'automne tombées dans la cour ?

Pourquoi le Russe crache plus que le Français ?

Comment le petit garçon tout mignon aux incroyables yeux bleus peut-il soudainement se métamorphoser en immonde postpubère barbu ?


A quoi servent les professeurs russes ?

Pourquoi la jeune fille russe s'habille-t-elle de façon provocatrice tout en refusant de se faire draguer par le chaland du coin en boîte ?

Pourquoi donc ai-je une baignoire dans ma cage d'escalier ?



***



Je fais aussi le plein, chaque minute qui passe, de petites anecdotes si particulières à la "russkaya dousha" (âme russe) et qui me font aimer si profondément la Russie.



Dans la marshrutka, ceux qui ne peuvent accéder au comptoir de la "contrôleuse" passent sans angoisse l'argent du billet à leur voisin. Qui le passe à son voisin le plus proche. Et ainsi de suite, jusqu'à former une petite chaîne humaine où repassera en sens inverse le ticket de bus. Aucun rouble ne se perd, et personne ne songe un instant à voler cet argent. Tout comme il ne viendrait jamais à l'idée d'un Russe de ne pas payer son trajet de bus.



Plusieurs explications sont possibles à ce comportement digne de l'Homo Sovieticus dont rêvait Staline : premièrement, les marshrutkas et les bus représentent une amélioration notable du quotidien de Nijni-Novgorod, qui n'avait que très peu de lignes de transports auparavant. Ainsi, mon quartier était très excentré il y a peu. La mise en place de ces infrastructures date d'il y a plus ou moins deux ans, et les habitants en sont si contents que leur attitude exemplaire leur semble justifiée, malgré la vetusté apparente des véhicules...




La télévision russe possède une chaîne d'information continue, dont le majoritaire actionnaire est bien sûr le Kremlin. Pas de quoi s'offusquer... Après tout en Europe, c'est aussi le cas (France 24, par exemple). Mais ce qui m'amuse particulièrement sur cette chaîne, c'est que peu importe le sujet, ce sera toujours un homme politique russe qui en parlera. Fanny Mae et Freddy Mac sont à la une ? Pas de problème, cette chère Elvira Nabioullina sera là pour rassurer la population et donner un interview soporifique de deux heures. Le pape vient faire un coucou aux Français ? Hop, un rappel sur le schisme vieux de plusieurs siècles entre l'Eglise Orthodoxe et l'Eglise Catholique sera sûrement le bienvenu. Et puis on invitera ce brave barbu-made-in-moscow pour approfondir un peu plus la question...

Aux journaux télévisés s'enchaînent les discours interminables des Lavrov, Chmatko, Foursenko, Choïgou et autres ministres. Dmitri Medvedev pratique un hyperprésidentialisme forcené qui ferait passer Sarkozy pour un petit timide. Sans oublier que cette forte présence s'accompagne par une très forte activité médiatique de Vladimir Poutine, ou plutôt devrais-je dire, de Celui-dont-les-Tigres-ne-prononcent-pas-le-Nom. Car le dernier haut fait d'armes du chauve du Kremlin est d'avoir sauvé quelques journalistes des griffes d'un féroce tigre.

Résultat, l'information est traité d'un point de vue exclusivement russe. De l'autre côté du miroir, Euronews paraît aux Russes plein de propagande pro-européenne et anti-russe. Et si c'était vrai ?

Monday 15 September 2008

Photos (IV) - 1er Week-end de folie

Pour la fête de la ville, un grand concert est organisé ainsi qu'une parade militaire (que je n'ai malheureusement pas vue).
Les drapeaux russes ne marquent pas ici, comme on pourrait le croire au premier abord, la tenue d'une manifestation xénophobiste, mais sont au contraire l'apanage habituel de tout évènement (concerts, fêtes, mariages...).

Le Kremlin, de nuit.

Kirill, Natalia et Frédérick, au Milo ou à Bessonitsa.





Masha fêtait ses dix-huit ans. Alors forcément il y avait dix-huit bouteilles de vodka. Je vous rassure, nous ne les avons pas finies !



En bref, ce fut une soirée extraordinaire, dans un restaurant nommé Bordel (!!), avec une très bonne ambiance et des russes totalement déjantés.



A venir : les photos du photographe professionnel venu pour la soirée (re: !!).











A Bessonitsa (Insomnie), club tendance du moment, Frederick a réappris aux Russes (entre autres Kirill) comment fumer à la soviétique.

Fresque exaltant le combat communiste et l'avènement d'un homme nouveau, sur un des murs de mon université.
La révolution rouge est comparée à celle de 1789, comme on peut le voir en bas à droite.









Natalia, actuelle Moscovite mais toujours Nijnoise de coeur.

Photos (III)


Jolie petite eglise dans le quartier de Sasha


Mon immeuble



Monument aux Morts, dans l'enceinte meme du Kremlin.


C'est moi qui l'ai fait ! 1er blin ! 


Lors de ma croisiere sur la Volga

Tuesday 9 September 2008

Photos (II)

Après la cérémonie à la mairie, les nouveaux mariés, accompagnés d'une petite assemblée de quelques personnes vont se promener dans l'enceinte du Kremlin. Un cameramen et des photographes les suivent afin d'immortaliser de la façon la plus kitschissime possible le premier jour de leur vie commune.

Sur la Volga, une péniche.

Ici, le miel se mange nature, et est ramené directement de la datcha familiale.

Mon parapluie anglais connait enfin la pluie russe...


Journal de bord au rendez-vous


Edouard est effare devant l'etat de notre rue... (boue + sable + orties + chiens sauvages + pluie = que du bonheur !) heureusement, elle reprendra un aspect un peu plus normal quelques jours plus tard.

Photos (I)


Le Kremlin, vu de la Volga avec ses nombreuses eglises


Edouard, avec Ania et Katia, sur la plus grande rue commercante de Nijni-Novgorod.


Oksana, la jeune fille de ma famille d’accueil, adorable !


… Et Irina, la mere de ma famille d’accueil, avec Cherlyshka.


Prisonniers du Kremlin ! (starring Sasha et Katia)


Coucher de soleil sur la Volga, des hauteurs du Kremlin.


Friday 5 September 2008

KUSHAIIIII-power : ou quand mes papilles scintillent de joie


Quand on parle de la cuisine russe, plusieurs mots barbares nous viennent а l’esprit : BORSH (soupe aux betteraves), BLINI (crepe а la russe), CAVIAR (ikra) et VODKA (pour les fins connaisseurs).

Eh bien, je souhaiterais partager ici mon ebahissement sans limite eprouve des mon premier repas а Nijni-Novgorod. La cuisine russe est loin d’etre monotone ; au contraire, elle est d’une intense variete. (par contre, bonjour les kilos : vous m’avez connue taille 38, je reviendrai taille sumo).

Contrairement а un repas francais, le repas russe est directement inspire du mouvement anarchiste. Hors de question que l’on s’abaisse а hierarchiser les differents plats (pourquoi l’un serait davantage « principal » que l’autre ? et pourquoi donc appeler « entree » ce qu’on peut aussi manger en fin de repas ?) ! Cela revient en fait а manger plusieurs plats principaux : par exemple, on commence par du SHI (soupe au chou) avec du KAPOUSTA (chou cru) puis on attaque les KOTLETT (boulettes de VNI - viande non identifiee) avec des MAKARONI (petits spaghettis de quelques centimetres, c’est ce que mangeaient principalement les russes pendant le chaos economique des annees 90) ou des PELMENI (raviolis a la viande). Puis arrive le dessert : raisin, ou ZIEFIR (marshmallows enrobes de chocolat) avec le traditionnel TCHAI (the).
Le dessert s’etire indefiniment, on papote, on mange а nouveau, on grignote, on oublie les regles elementaires de la dietetique et on s’adonne aux plaisirs du chocolat. Puis chacun vaque dans son coin, puis, une heure ou deux plus tard, il est temps de se retrouver autour d’un lait chaud ou fond le miel ramene par la baboushka lors de sa derniere expedition dans la datcha familiale.
Manger est une activite sociale, et ne se dissocie jamais du the : meme а la tele, а la fin de certaines emissions, on peut voir la personne invitee sur le plateau se faire servir du the et des PIROJKI (petits gateaux fourres aussi bien а la viande qu’aux cerises). S’asseoir et bavarder se fait avec the, ou ne se fera pas.

« ON MANGERA LES RESTES DEMAIN AU PTIT DEJ »
euh …

Tandis que le diner est un moment agreable, chaleureux, ou l’on se raconte les dernieres nouvelles avec enthousiasme, le petit-dejeuner est autrement plus traumatisant pour les petits Europeens. Alors qu’on s’attend а des tartines ou des cornflakes, on se retrouve а six heures du matin nez а nez avec des saucisses melangees au cafe, sans oublier le reste de la soupe d’hier-soir et du borsh en veux-tu-en-voilа. Tout cela peut tres bien s’accompagner de TVOROK (sorte de fromage blanc tres sucre et condense) et d’un chocolat chaud… Quand le sale rencontre le sucre, il le fait en Russie dans la plus grande confusion ! On s’y habitue neanmoins tres vite…
Manger enormement le matin est primordial а Nijni, car non seulement il faut affronter les trottoirs delabres et les marshrutki bondees, mais en plus le dejeuner est quasi inexistant : on achete quelques pirojki tout au plus… La morfale que je suis a du mal а faire son deuil de son lunch quotidien, ce qui fait que je m’attaque aussi aux specialites stop-fringale-help, tel que ce delicieux potage de legume couvert de fromage fondu et SMETANA (creme fraiche)…

Vkussno…

En bref, c’est une cuisine qui au premier abord parait simpliste, voire rustique, et qui revele а qui sait faire des efforts d’extraordinaires ressources et une inventivite sans egal : quand on sait que la plupart des plats russes ne sont constitues que de cinq-six varietes de legumes (dont la celebre KARTOSHKA – pomme de terre) et de lait.

Il s’agit bien sur d’observations tirees de ma propre experience : il se peut que cela differe selon les familles. Allez hop, а table, et promis, je vous fais un rapport complet de mon prochain festin.


BRAVER LA MORT POUR ALLER A L’UNIVERSITE : mon quotidien (non je ne dramatise pas)


Pour aller а l’universite, il suffit de s’armer de courage et de dix roubles. J’habite а la fin de la prospekt Gargarina, qui s’etend sur plus de dix kilometres d’embouteillage, oщ cohabitent Lada, Logan et autres voitures datant de l’вge de pierre, dans un joyeux concert klaxonphonique. Deux fois par jour, je risque ma vie et ma sante mentale dans une marshrutka.

Marsh… quoi ?? Il m’a fallu trois trajets pour comprendre la veritable nature de la marshrutka. Il s’agit d’une petite camionnette, appartenant а la Mafia locale selon les rumeurs, qui ressemble а un petit Combi venu tout droit de l’epoque hippie, Beatles et compagnie. Sauf que la realite est un peu moins technicolor. Imaginez-vous vingt а trente personnes pressees les unes contre les autres dans un peu moins de dix metres carres, tout cela roulant soit а 0,032 km/h (lors des gigantesques et effroyables embouteillages matinaux), soit а 90 km/h (le soir, et en freinant toutes les deux minutes, ce qui parait suicidaire quand on sait qu’on est debout et dans une veritable carcasse, digne d’etre recyclee par Wall-E.) Et comme si quinze minutes de cet enfer ne suffisaient pas pour donner la vocation campagnarde а la city girl que je suis, je dois supporter ce calvaire une heure, voire une heure et demie, deux fois par jour. C’est а vous faire rever du metro parisien aux heures de pointe !

N’importe quel russe realiserait ici que j’omets un detail important : comment aller jusqu’а l’arret que dessert la marshrutka. Au premier abord, cela parait simple. Vous connaissez le chemin jusqu’а la station. Vous savez qu’il vous faut а peu pres dix minutes. Vous voyez des femmes en talons partout, alors innocente petite touriste que vous etes, vous osez les ballerines en tweed, pensant qu’elles sortiront intactes de votre epopee. Mais а peine etes vous sortis que vous assiegent (dans l’ordre) : la pluie diluvienne, le chien du voisin (а moins que ce ne soit un de ces chiens sauvages qui rфdent partout, а l’affыt d’un bout de viande fraiche, ce que a priori vous etes malgre vous), la boue, et les gouffres qu’a creuse la pluie dans le goudron des rues. Si vous etes du genre la-chance-est-avec-moi (comme c’est mon cas), vous avez meme le droit а la rue en travaux. Or c’est la seule qui peut vous mener jusqu’а la marshrutka. A vous des lors les orties et les montagnes de sable а escalader : o joie !

Couverte de boue, de sueur, piquee et mordue de partout, vous arrivez enfin а l’universite. Quelques dizaines de magnifiques Russes vous toisent, perchees sur leurs talons incroyablement hauts, habillees а la derniere mode moscovite (comprenez : un melange de classe et de vulgarite, tout cela avec des jambes aussi longues que la prospekt Gargarina et des jupes aussi inexistantes que le sex-appeal des hommes russes.). Les commentaires vont bon train : « Tu crois que la boue sur les chaussures, c’est parce-que la tendance du moment а Paris c’est le cote dirty ? ».

La journee peut commencer…




NIJNI-HI-HI-HI


Le Bonjour de Russie, chers amis !

Autour de moi, des jeunes filles se tordent la cheville du haut de leurs talons vertigineux, les rares garcons presents sont plus laids les uns que les autres, et des centaines de baboushki se ruent vers les bus bondes et en piteux etat … pas de doute, je suis bien en Russie !

Et ceci depuis une semaine. Apres un court passage а Moscou, capitale enchanteresse, j’ai debarque а Nijni-Novgorod avec trente-deux kilos de bagages exactement et cinq heures de train а mon actif. Sur le quai de la gare m’attendait un veritable comite d’accueil des plus impressionnants : ma famille d’accueil et leurs amis, ainsi que les connaissances nijnoises de mes amis moscovites. Chacun s’est empare de mes valises et je me suis retrouvee, ni une ni deux, dans une Lada, roulant а toute allure sous la pluie, frolant le kremlin et les domes dores des eglises orthodoxes…
… direction 12, Ulitsa Joukova kv.53 indeks 6O3137. Ou plutot : 12 ул. Жукова Кв. 53 инд. 603137 Н.Новгород. (ca parait tout de suite moins comprehensible.)

Un mignon petit appartement, amenage а la russe mais moderne, m’attend avec le chat et le borsh qui avec. Ma famille russe se constitue d’une jeune fille de seize ans – Oksana -, et de sa mere – Irina -. Pendant les repas, j’ai le droit а une lecon de vocabulaire complete sur les ustensiles de la cuisine et divers mets culinaires made in Poutineland. Le matin, c’est au tour de la brosse а dent, du miroir, des habits de se russifier… Elles m’ont meme offert des post-it pour que je puisse les coller sur mes meubles afin d’apprendre leur signification en russe ! Si avec ca je ne progresse pas, je suis bonne pour le g.o.u.l.a.g estudiantin !